UCP, mouvement social des aînés ASBL - Secrétariat fédéral
Un KIWI Belge ?
Ou comment alléger le coût des traitements médicaux de manière sûre pour les patients tout en
aidant l'INAMI à contrôler ses dépenses.
Le commerce des médicaments est très particulier en ce sens que la facture est payée d'une part
directement avec les deniers du malade mais aussi d'autre part par la sécurité sociale grâce aux
cotisations des assurés sociaux. C'est ainsi que près de 20% du budget des soins de santé est
absorbé par le remboursement des médicaments. Les pouvoirs publics tentent de maîtriser
l'évolution des dépenses. Toutefois le coût des médicaments augmente chaque année. C'est
pourquoi faire baisser le prix ainsi que la surconsommation des médicaments devient une priorité
urgente pour tous ceux qui se préoccupent de l'équilibre budgétaire de notre sécurité sociale.
Le modèle KIWI est un thème régulièrement évoqué ces derniers temps dans les médias. A ce
propos, le Dr Van Duppen a lancé en 2004 l'idée, largement répercutée depuis, de s'inspirer d'un
modèle utilisé en Nouvelle-Zélande - connu sous le nom de "modèle Kiwi" - pour tenter de faire
sensiblement baisser le prix des médicaments sans la moindre répercussion négative sur la qualité
des traitements. Le but est de réaliser un allègement conséquent de la part personnelle des patients
ainsi qu'une économie pour la sécurité sociale. Il faut savoir que ce modèle fonctionne également
dans certaines régions du Canada tandis qu'aux USA les fonctionnaires en bénéficient. De même,
en Belgique, l'armée, certains CPAS, des hôpitaux aussi négocient directement avec les firmes de
façon analogue pour la fourniture de médicaments d'usage courant. Ce système n'est donc pas
complètement inconnu dans notre pays.
Le modèle KIWI est une forme d'appel d'offres public destiné à choisir les médicaments qui seront
remboursés. Cette soumission a pour but de sélectionner le médicament le moins cher dans chaque
classe de médicaments. On estime que si l'INAMI lançait une soumission publique pour une classe
de médicaments en mettant en concurrence les différents laboratoires, elle pourrait obtenir le prix le
plus bas. La firme qui propose le meilleur prix obtiendrait un remboursement à 75% tandis que les
autres devraient se contenter de 50%. En échange de quoi, ce médicament recevrait l'exclusivité du
remboursement de son produit pendant trois ans. Ce dispositif ne concerne que les médicaments qui
ne sont plus protégés par un brevet (qui sont donc sur le marché depuis 12 ou 15 ans). Cela
implique qu'environ 2/3 du marché du médicament sont épargnés mais peuvent toujours entrer en
concurrence entre eux. Pour rappel, les médicaments hors brevet ont une certaine ancienneté qui
entraîne le fait qu'ils puissent être concurrencés par des génériques.
Il existe des dizaines de médicaments différents, produits par plusieurs firmes classés dans la
catégorie des "anti-inflammatoires non-stéroïdiens" (AINS). Ce sont des médicaments utilisés dans
les affections rhumatismales, qui sont particulièrement fréquentes chez les aînés. Or, objectivement,
on peut considérer qu'aucune de ces molécules n'est vraiment plus active ou mieux supportée que
l'autre. Le modèle Kiwi pourrait donc valablement s'appliquer à ce type de médicament.
Le 11 mai 2006, le Ministre de la Santé, Rudy Demotte a signé un arrêté royal qui introduit la
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possibilité d'accorder non pas d'offrir l'exclusivité du remboursement au médicament le moins cher
de sa classe, mais seulement de lui garantir un remboursement plus avantageux. Le ministre aura
néanmoins la possibilité d'appliquer un remboursement linéaire de 75%. Il espère lancer le premier
appel d'offres « au plus tard en 2006 ». On commencerait par deux catégories de médicaments qui
existent déjà en génériques : les statines (anti-cholestérol), qui concernent 700.000 patients, et les
anti-acides pour l'estomac, qui sont les deux catégories de médicaments les plus coûteuses pour
l'INAMI. La contraception orale a été exclue d'emblée tant chaque situation est particulière. Dans un
premier temps, les médicaments ayant remporté l'offre seraient les seuls à être remboursés mais
certains envisagent de prévoir un remboursement à 25% pour les autres dans l'idée d'une certaine
liberté thérapeutique. Les spécialistes estiment que l'économie avoisinera les 15 millions d'euros.
Toutefois, les premiers médicaments à prix réduit ne devraient pas arriver sur le marché avant le 1er
Quels peuvent être les points positifs ?
La liberté thérapeutique est préservée : le remboursement « vainqueur » de l'appel d'offre aura le
meilleur remboursement, les autres médicaments pourront toujours être prescrits mais à un coût plus
Les économies ainsi réalisées dans le secteur des médicaments pourraient par exemple être
affectées par l'INAMI dans le domaine des soins de santé à domicile et au remboursement plus
rapide des molécules réellement innovantes.
Il faut savoir que l'industrie pharmaceutique est probablement celle qui engrange les plus gros
bénéfices. Pourtant elle avance l'argument que cette initiative va étrangler la recherche par manque
de crédit. C'était déjà l'argument, non fondé, qui était utilisé, alors qu'on parlait des génériques.
D'emblée, il faut constater que la recherche est plus orientée vers des maladies pour lesquelles des
traitements existent déjà plutôt que vers des maladies pour lesquelles l'arsenal thérapeutique est
encore insuffisant. En outre, les montants qui ne sont plus affectés à la publicité pourraient être
consacrés à la recherche. En effet, à partir du moment où le remboursement d'un médicament se fait
sur la base du modèle "Kiwi", les frais de promotion ne sont plus nécessaires puisque le produit
remboursé n'a pas de concurrent pendant 3 ans !
En réalité, toutes les ressources dégagées par le modèle "Kiwi" stimuleront la recherche en
permettant un remboursement plus rapide de molécules réellement nouvelles, apportant
véritablement un plus dans le traitement de certaines pathologies pour lesquelles les médecins sont
Toutes les économies sont bonnes à faire et dans cette optique le modèle Kiwi est une façon d'en
réaliser. Ce ne sera pas facile à imposer car c'est un système original qui secoue les habitudes.
Certaines firmes pharmaceutiques semblent réticentes : elles y voient une fonte partielle de leurs
plantureux bénéfices. Le secteur occupe 26.000 travailleurs en Belgique ; nous espérons qu'ils ne
seront pas les otages d'un chantage aux suppressions d'emplois !
Quels sont les limites éventuelles du modèle KIWI ?
En premier lieu, il faut disposer d'une instance indépendante disposant de suffisamment de
compétence pour comparer les différentes molécules entre elles, les évaluer et en reconnaître la
similitude ou la différence d'effets. Or, nous savons qu'en Belgique, la diffusion de l'information
indépendante est défaillante. Les journaux s'adressant aux médecins sont soutenus par les groupes
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pharmaceutiques ; les délégués médicaux sont payés par les mêmes firmes : comment être
Ensuite, il y a des contraintes pour les firmes qui rentrent dans ce système : il faut pouvoir assumer
50% du marché pendant 6 mois pour remettre une offre.
Une autre limite pourrait apparaître si une firme pharmaceutique crée artificiellement une pénurie de
médicament. Certains pensent que le risque est faible car une telle démarche peut se retourner
contre son initiateur. Face à une telle situation, comment réagirait l'opinion publique ? Pourquoi pas
par un boycott de tous les produits de cette firme . ?
Pour combattre ce modèle, certains avancent un inconvénient : un bouleversement des habitudes à
cause de la révision du traitement en fonction de la molécule remboursée si l'exclusivité ne dure que
3 ans (durée du remboursement préférentiel). Certains jugent que les patients ainsi que le milieu
médical ne vont plus s'y retrouver si tous les trois ans la forme et le nom du médicament changent.
Pourquoi rencontre-t-on sur le marché belge jusqu'à 17 médicaments produits par des firmes
pharmaceutiques différentes pour traiter la même affection ? Est-ce nécessaire ? Pourquoi en
Belgique, le Voltaren anti-inflammatoire coûte-t-il 21 euros au lieu de 2 euros en Nouvelle-Zélande ?
Pourquoi de telles différences ? L'UCP estime que le modèle Kiwi pourrait être un instrument pour
alléger la facture santé. Dans la mesure du possible, il faut laisser une chance réelle à cette
possibilité de faire ses preuves afin de maintenir un système de santé accessible à tous.
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