« Présentation : Cultures et médicaments. Ancien objet ou nouveau courant en anthropologie
Anthropologie et Sociétés, vol. 27, n° 2, 2003, p. 5-21.
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PRÉSENTATION Cultures et médicaments. Ancien objet ou nouveau courant en anthropologie médicale? Alice Desclaux et Joseph-Josy Lévy
The taking of medications is a powerful means
of both regulating the body and embodying values.
Dans la rencontre entre médicaments et cultures, la complexité et la diver-
sité ne se situent pas que du côté des cultures : les médicaments – que nous dé-finirons comme des produits pharmaceutiques industriels élaborés sur la base deréférences scientifiques relevant de la biologie, de la biomédecine et de la phar-macie – sont des objets saturés de sens, et très ambivalents. Objets concrets, par-fois prosaïques, intégrés dans l’espace privé et le temps quotidien, qui semblentjustifiés par une efficacité matérielle sur les corps échappant largement à la cons-cience de ceux qui les consomment ; objets dont la matérialité est également ter-riblement efficace, puisque des centaines de millions de personnes ne doiventleur (sur)vie qu’à leur consommation. Ils sont aussi le support d’un investisse-ment idéel, d’interprétations, d’élaborations symboliques, en rapport avec la cul-ture scientifique biomédicale qui les produit et avec les multiples cultures etsous-cultures qui les (ré)interprètent. Ils sont de plus des objets sociaux, véhicu-lant des rôles, des rapports de savoirs et de pouvoirs plus ou moins inégalitaires,légitimant l’organisation d’institutions, de systèmes, de réseaux. Leur rôle cru-cial dans le système de sens de la biomédecine, dans la relation thérapeutique, etdans le rapport de l’individu au corps sain ou malade, laisserait penser qu’ilsoccupent une place centrale dans les travaux en anthropologie médicale depuisses débuts. Ce n’est pas tout à fait le cas, aussi est-il utile d’ouvrir cette présen-tation sur une tentative de repérage des travaux portant sur les rapports entremédicaments et culture(s) dans le champ de l’anthropologie médicale.
L’anthropologie médicale a connu au cours des trente dernières années des
développements importants tant aux plans théorique et méthodologique qu’em-pirique (Foster 1976 ; Genest 1978 ; Murdock 1980 ; Kleinman 1980 ; Young1982 ; Worseley 1982 ; Augé et Herzlich 1983 ; Zempléni 1985 ; Augé 1986 ;Laplantine 1986 ; Retel-Laurentin 1987 ; Massé 1995 ; Benoist 1996 ; Sargent etJohnson 1996 ; Baer, Singer et Susser 1997). Ces développements ont suivi de
Anthropologie et Sociétés, vol. 27, n° 2, 2003 : 5-21
ALICE DESCLAUX ET JOSEPH-JOSY LÉVY
nombreuses directions, constituant des courants dont certains ont affirmé leuroriginalité sur la base de références théoriques ou d’institutions propres, alorsque d’autres prolongeaient ou « revisitaient » des approches antérieures en lesappliquant à de nouveaux objets. Certains de ces courants se situent dans lechamp de l’anthropologie sociale et culturelle et portent la marque des réflexionsqui ont traversé l’ensemble de la discipline, alors que d’autres se réfèrent à uneapproche bioculturelle, sensible aux avancées de l’épidémiologie, de la biologieet de la santé publique, souvent dans l’optique d’améliorer l’intervention sani-taire. Sans parvenir à une catégorisation qui fasse l’objet d’un consensus, l’ap-proche taxonomique étant des plus hasardeuses dans un champ très dynamique,les auteurs qui ont tenté de dresser un inventaire de ces courants ont distingué :l’écologie médicale, axée sur les relations complexes entre les systèmes écologi-ques, la santé et la maladie et l’évolution humaine ; l’épidémiologie sociocultu-relle, qui compare la prévalence des pathologies dans des populations quedistinguent leur organisation sociale et leur culture ; l’éthnomédecine qui traitedes constructions socioculturelles de la maladie et des systèmes de guérison ;l’anthropologie médicale appliquée, qui analyse les politiques de santé, la pré-vention et les stratégies d’intervention afin de les optimiser ; la socio-anthropo-logie qui s’intéresse plus particulièrement aux rôles, distinctions, inégalités etusages sociaux construits autour de la maladie ; l’anthropologie politique de lasanté qui analyse les faits de santé et de maladie en termes de rapports de pou-voir économique et politique ; l’anthropologie médicale critique qui aborde labiomédecine en tant que production culturelle ; l’ethnopsychiatrie qui analyse lesrapports entre psychisme, santé mentale et culture, comme le fait l’anthropolo-gie clinique ; l’ethno-pharmacologie qui étudie la construction culturelle des re-mèdes en articulation avec l’analyse pharmacologique des produits utilisés(McElroy 1996 ; Sargent et Johnson 1996 ; Brown 1998 ; voir également les tra-vaux recensés par Benoist 2002). Parmi ces courants, plusieurs ont abordé ré-cemment, chacun à sa manière, le rapport entre culture(s) et médicaments.
Cela conduit à s’interroger sur le sens de cette récente production scienti-
fique : le médicament n’est-il qu’un objet d’étude « classique » mais redécouvertdepuis peu, qui focaliserait certaines interrogations particulièrement pertinentesau tournant du siècle, dans le champ de la santé publique ou dans celui de l’an-thropologie médicale? Pose-t-il des questions spécifiques, traitées préférentielle-ment par certains courants de l’anthropologie médicale? Ou « l’anthropologie dumédicament » est-elle en passe de constituer un nouveau courant de l’anthropo-logie médicale, avec son ossature théorique, ses objets et ses méthodes, justifiantl’appellation, proposée par Van der Geest et Reynolds White (1988) d’« anthro-pologie pharmaceutique »? Le propos de ce numéro d’Anthropologie et Sociétésest de présenter, à partir d’études originales suffisamment diverses pour illustrer
la multiplicité des thèmes et approches en anthropologie du médicament, un ra-pide état des lieux qui nourrira la réflexion sur l’épistémologie d’un champ (oud’un courant) de recherche.
Mais d’abord, il est utile de discuter les facteurs qui ont favorisé la multi-
plication de ces travaux au cours des dernières années et la constitution du médi-cament comme un objet pertinent en anthropologie. L’intérêt de l’anthropologiepour le médicament n’a suivi qu’avec retard le développement et l’extension deses usages. Jusqu’aux années 1980, le médicament n’apparaissait en ethnologieque de manière ponctuelle, essentiellement dans des travaux d’anthropologieappliquée ou au détour d’études ethnomédicales : la majorité des recherches con-sacrées aux thérapeutiques ne s’intéressaient qu’aux « remèdes » sous leurs for-mes les plus diverses – des pharmacopées aux objets thérapeutiques. À partir desannées 1960, les firmes pharmaceutiques et les organismes scientifiques déve-loppent une recherche en ethnopharmacologie portant sur les savoirs thérapeuti-ques, dans l’espoir de découvrir des substances animales, minérales ou végétales,aux propriétés pharmacologiques susceptibles de fournir le substrat au dévelop-pement de nouveaux médicaments. Le rôle de l’ethnologue y est limité à l’éta-blissement d’inventaires de taxonomies, de pratiques de transformation ou deconservation des préparations thérapeutiques « traditionnelles », sans aborder lesusages complémentaires de médicaments (Fleurentin, Pelt et Mazars 2002). Cesrecherches se développent sous l’effet de la politique de l’Organisation Mondialede la Santé en matière de soins de santé primaire, exprimée par la déclarationd’Alma Ata, en 1978, qui ouvre la voie à l’utilisation des médecines tradition-nelles dans les systèmes de soin à la condition qu’elles aient fait la preuve deleur efficacité. Ainsi, parce qu’un « remède » tel qu’une décoction ou un objetthérapeutique préparés selon des prescriptions rituelles est, en première lecture,plus chargé de sens pour l’ethnologue qu’un simple comprimé, et parce que larecherche en ethnopharmacologie promettait tant l’accès pour tous à des médica-ments simples et « naturels » attendus par l’OMS, que des trésors pharmacologi-ques susceptibles d’être exploités par les firmes, le médicament a longtemps étééclipsé, dans la recherche anthropologique, au profit du remède.
L’histoire du médicament a débuté au XVIIIe siècle lorsque se met en
place un paradigme scientifique, articulé sur une théorisation de plus en pluspoussée des mécanismes de fonctionnement de l’organisme et des propriétéspharmacologiques des substances chimiques, naturelles ou synthétiques, qui con-tribue à la production de traitements plus efficaces (Chast 1995 ; Dagognet1964). Au cours du siècle suivant, débute la production industrielle de médica-ments à partir de techniques d’extraction des alcaloïdes végétaux et de leur com-mercialisation puis de la fabrication synthétique de composés ayant des proprié-tés pharmacologiques reconnues et provenant de produits naturels (houille,pétrole) ou synthétiques (benzène ou phénol par exemple). Les progrès dans la
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chimie des colorants synthétiques seront par la suite à la base d’innovations im-portantes : les sulfamides qui ont permis de lutter efficacement contre les mala-dies infectieuses, les anti-histaminiques et les premiers neuroleptiques, commela chloropromazine, dérivent de ces travaux. La production des premiers antibio-tiques comme la pénicilline, découverte accidentellement puis produite indus-triellement, puis de nouvelles classes thérapeutiques comprenant les corticoïdes,la pilule contraceptive, le facteur de coagulation, les anti-hypertenseurs, etc. quirévolutionneront les stratégies de traitement couvrant un spectre de plus en pluslarge de maladies, est à l’origine de ce que l’on a qualifié de « révolution théra-peutique » du XXe siècle (Faure 1999). Du fait de leurs retombées économiquestrès importantes, les médicaments font l’objet d’une compétition féroce menéepar les grandes multinationales pharmaceutiques dont les méthodes de rechercheet les techniques de production se situent de plus en plus aux confluents de nom-breuses disciplines (chimie, biologie, génétique et robotique). La place qu’occu-pent les médicaments dans la vie quotidienne est essentielle, attestée par l’assi-milation de noms commerciaux de médicaments, tels Prozac ou Viagra, dans levocabulaire courant de populations de plus en plus vastes sur les cinq continents. Les domaines de la vie bouleversés par l’efficacité matérielle des médicamentsne concernent plus seulement le traitement des maladies, mais la gestion de lafécondité, de la nutrition ou des émotions. Les trois dernières décennies ont ce-pendant remis en cause les succès des médicaments, essentiellement pour lesmotifs suivants : l’apparition de limites dans l’efficacité de traitements tels queles antibiotiques confrontés à l’émergence de résistances bactériennes, la fré-quence croissante d’effets toxiques générateurs de pathologies iatrogènes occu-pant désormais une place importante dans les causes de mortalité, les inégalitéssociales dans l’accès aux traitements désormais connues par le public, la visibi-lité des stratégies de construction sociale par les firmes de « besoins des popula-tions » correspondant aux nouvelles molécules disponibles, et les interrogationssur le sens de la « médicamentalisation » du bien-être. Les antirétroviraux, qui,prescrits en multithérapies, ont transformé le pronostic de l’infection par le VIH,ont cristallisé l’ambivalence des représentations sociales contemporaines et lacomplexité des questions de santé publique concernant les médicaments. Présen-tés comme des progrès radicaux dans un contexte de stagnation de l’innovationthérapeutique, ces médicaments, marqués par des effets secondaires importantset des limites étroites au plan de leur efficacité, ne sont disponibles que pour despopulations ou des groupes sociaux déterminés – qui ne représentent qu’uneminorité des personnes nécessitant ces traitements –, en fonction de leur apparte-nance à des pays, des catégories sociales ou des systèmes d’organisation socialeet politique. Cette histoire du médicament, marquée par des succès et des échecsd’un point de vue de santé publique, est aussi une histoire sociale, politique et
culturelle. Car le médicament n’est pas qu’un produit pharmaceutique médicale-ment efficace : il est également une marchandise, et un opérateur pour un ensem-ble de réseaux socioéconomiques, de pratiques, de représentations, de construc-tions socioculturelles associant le traitement notamment – mais pas seulement –à la maladie socialement représentée.
Il est remarquable que l’anthropologie du médicament ait émergé dans une
période de « désenchantement » vis-à-vis de la thérapeutique pharmaceutique,comme si les limites de l’efficacité ouvraient un espace de réflexions jusqu’alorsocculté par une approche positiviste du médicament. C’est autour de l’utilisationdes médicaments dans les pays du Sud, simultanément à partir d’interrogationsappliquées et dans une perspective d’anthropologie sociale et culturelle, que lespremiers travaux conséquents en anthropologie du médicament ont été réalisésou coordonnés par Van der Geest et Reynolds Whyte (1987, 1988), chefs de filede ce champ de recherche, puis par d’autres chercheurs, souvent associés àl’Unité d’Anthropologie Médicale de l’Université d’Amsterdam (Etkin et Tan1994 ; Nichter et Nichter 1996 ; Tan 1989 ; Hardon 1987). Puis le retour versune « anthropology at home » a conduit des chercheurs à s’intéresser au médica-ment dans les pays développés, en tant qu’objet transcendant les espaces, de l’in-dividuel au social, du privé au public, du sanitaire au religieux, et simultanémentopérateur technique et symbolique au cœur de la relation thérapeutique (Fain-zang 2001 ; Benoist 1999). L’apparition des multithérapies antirétrovirales dansles années 1990 a également amené des anthropologues travaillant sur le sida às’intéresser aux dimensions sociales, culturelles et politiques des traitements,parfois à la demande des institutions sanitaires (Farmer et al. 2001, Lévy et al. àparaître, Desclaux 2001). Enfin, les travaux récents sur la construction socialedes pathologies mentales dans les sociétés occidentales ont abordé le médica-ment comme produit addictif, comme « marqueur social », ou comme thérapeu-tique (Ehrenberg et Lovell 2002, Haxaire 2002). La multiplication des étudesréalisées dans de multiples aires culturelles a été attestée au cours d’un colloqueinternational sur l’anthropologie des médicaments tenu à Aix en Provence en20021.
Il serait hasardeux de présenter en quelques pages un inventaire des multi-
ples thèmes de recherche et dimensions d’analyse relatifs aux rapports entre mé-dicaments et cultures. Tout au plus peut-on, en s’appuyant sur les grilles delecture du champ de l’anthropologie du médicament existantes, et sur les princi-paux concepts et modèles d’analyse utilisés dans ce domaine, tenter de donner
Ce colloque était organisé par l’association AMADES (Anthropologie Médicale Appliquéeau Développement et à la Santé; www.amades.net) et le Laboratoire d’Écologie Humaine etd’Anthropologie de l’Université d’Aix-Marseille. ALICE DESCLAUX ET JOSEPH-JOSY LÉVY
un aperçu d’une ossature théorique, en cours de constitution, visant à aborder cesrapports.
Quelques auteurs ont entrepris de systématiser cette approche. Se fondant
sur un corpus important d’études ethnographiques, Nichter et Vuckovic (1994)proposent un agenda de recherche sur l’anthropologie des usages des médica-ments, dont ils cernent les principaux enjeux à partir de l’exposition de dix thè-mes majeurs couvrant à la fois les niveaux micro et macrosocial, des aspectsidéologiques jusqu’aux conséquences de l’usage des médicaments sur les moda-lités de soins de première ligne. En 1996, Van der Geest, Whyte et Hardon pu-blient une recension des recherches en anthropologie du médicament à partird’une « perspective biographique » qui ordonne les travaux selon une chronolo-gie, depuis les phases de production des médicaments jusqu’à l’évaluation deleur efficacité et ce, en tenant compte des contextes, des acteurs et des formes detransactions qui leur sont associés à chaque étape. Cette approche contribuera,selon ces auteurs, à saisir la dynamique des systèmes de santé (Reynolds Whyte,1992) et à « raffiner les théories sur la vie sociale des choses » (van der Geest,Whyte et Hardon 1996 : 171). La valeur heuristique de cette approche a été at-testée par le fait qu’elle a souvent été utilisée pour définir et contextualiser desétudes monographiques portant sur l’une ou l’autre des « étapes biographi-ques » : production, marketing, diffusion, prescription, distribution, utilisation,efficacité des médicaments.
Les travaux de Jean Benoist, qui s’est beaucoup intéressé à la construction
de l’efficacité sociale des médicaments dans les systèmes médicaux, ont recoursà une autre modélisation qui distingue, en cercles concentriques imbriqués, lesrapports personnels de l’individu au médicament, le niveau microsocial de l’ins-cription du médicament dans une relation thérapeutique et dans un rapport aux« autres signifiants » appartenant à l’entourage, le niveau mésosocial des grou-pes, catégories et réseaux sociaux, et le niveau macrosocial de la « société »,étroitement articulé à l’échelle nationale du système de soin, lui-même inscritdans un niveau « mondial » (1999). L’analyse des interactions entre différentsniveaux de ce système permet de rendre compte, notamment, des variations dusens du médicament dans un contexte de pluralisme médical (Benoist 1996).
Les études qui ont porté sur la diffusion et la distribution des médicaments
montrent combien ces deux aspects s’inscrivent simultanément dans des logiqueséconomiques et politiques complexes, régies par des contextes juridiques locale-ment divers, en cours de modification dans le cadre de la réglementation de l’Or-ganisation Mondiale du Commerce. Dans cette analyse, le modèle de Kleinman(1980), qui décrit un système médical composé de trois secteurs de soins de santé(populaire, biomédical et traditionnel), se révèle fort utile pour appréhender l’im-plication des acteurs. À condition d’être adapté aux configurations locales, ce
modèle théorique permet de montrer comment les médicaments circulent dans etentre ces trois secteurs perméables, lors de transferts entre marchés formels etinformels, qui font appel à des entrepreneurs multiples (distributeurs, grossistes,prescripteurs, pharmaciens, commerçants, vendeurs non qualifiés), contribuant àla diffusion des médicaments dans des espaces variés, en compétition et en ex-pansion constante. Cette circulation de produits s’accompagne d’une circulationde significations et de discours sur le sens des médicaments (Kamat et Nichter1998 ; Okumura, Wakai et Uwenaï 2002). Le concept de « système du médica-ment » (corollaire du concept anthropologique de « système médical », au sensde système de significations, système social et système opératoire) permet d’enanalyser les configurations locales. La distinction, proposée notamment parKleinman (1980), qui constitue l’un des paradigmes de l’anthropologie médicale,entre illness (qui correspond à la « maladie signifiée », telle qu’elle est perçue etinterprétée par le malade), disease (qui correspond à la réalité biologique destroubles), et sickness (qui correspond à la maladie socialisée), fournit égalementun outil d’analyse pertinent. En adaptant ce concept à l’analyse des variationslocales du rapport entre le « médicament signifié et interprété par le patient », laréalité de ses effets biologiques, et le « médicament socialisé », l’on peut abor-der des questions relatives au vécu des traitements, aux perceptions de leur effi-cacité et de leurs effets secondaires (Etkin 1994 ; Sow 2002), aux logiquessous-jacentes à l’automédication, à la sous-consommation ou à la surconsomma-tion médicale, aux réinterprétations de l’ordonnance. Enfin, les dimensions so-ciales et culturelles d’un médicament ne peuvent être comprises que s’il est situédans la pharmacopée et parmi les autres thérapeutiques disponibles localement,qui constituent un système dynamique, que Dagognet (1964) qualifie de « phar-macocénose », en écho au concept de pathocénose. La monographie réalisée parTan aux Philippines (1989) montre la pertinence de cette approche.
Les concepts qui ont été utilisés pour aborder le rapport entre médicaments
et cultures sont, on le voit, essentiellement issus de l’anthropologie médicale, ets’inscrivent dans les approches contemporaines de l’anthropologie sociale et cul-turelle qu’il serait vain de tenter de recenser ici. Ce corpus d’outils théoriquesadaptés à l’anthropologie du médicament doit encore être étoffé pour faire face àquelques particularités du champ, telles que le caractère extrêmement dynami-que des objets d’étude.
Le médicament constitue donc un thème important, au carrefour des inter-
rogations contemporaines sur la mondialisation, la santé et les systèmes théra-peutiques. De plus, révélateur privilégié des enjeux socio-politiques et culturels,il permet de saisir de façon originale les transformations dans ces domaines quitouchent à la fois les systèmes socioculturels et les individus dans leur rapportau corps, leurs pratiques de santé et leurs interprétations de la maladie et de la
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guérison. Les articles colligés dans ce numéro et rédigés par des chercheurs pro-venant d’horizons anthropologiques ou sociologiques variés (États-Unis, France,Pays-Bas, Danemark, Québec) sont traversés par trois concepts essentiels : cul-ture, système et polysémie du médicament.
Le rôle de la culture dans la détermination des significations, des usages et
des institutions construits autour des médicaments est une question centrale. Lemédicament est le plus souvent pris dans une relation interculturelle : issu d’uneculture biomédicale qui l’a saturé de sens, il est interprété ou réinterprété dansdiverses cultures locales ou sous-cultures populaires et professionnelles. L’an-thropologie du médicament est donc traversée, comme l’anthropologie médicale,par la problématique du culturalisme en santé publique (Fassin 2001) : les arti-cles d’Arachu Castro et Paul Farmer, et Alice Desclaux montrent que, contraire-ment aux discours des institutions sanitaires, les patients ne sont pas moinsobservants dans les pays du Sud du fait de schèmes cognitifs ou d’un rapport aumédicament propres à « leur » culture ; leurs pratiques – et donc l’efficacité destraitements – dépendent d’abord de l’organisation des institutions sanitaires etdes aspects économiques qui déterminent l’accès au médicament. La culture n’enest pas pour autant absente, mais ces travaux montrent qu’elle doit être abordéeen premier lieu d’une part sous l’angle de l’anthropologie économique ou del’anthropologie politique, d’autre part en considérant les interrelations entre l’in-sertion du médicament dans la culture des institutions sanitaires et son insertiondans les cultures locales. Ces observations préliminaires ouvrent de vastes pistesde recherche notamment en anthropologie économique du médicament. L’onpeut également s’interroger sur les éléments culturels qui déterminent le rapportindividuel au médicament. Au-delà des aspects examinés par l’ethnomédecine,de l’ethnophysiologie à l’ethnopharmacologie, les usages du médicament sem-blent fournir une « fenêtre » sur des aspects fondamentaux de la culture tels quele rapport au savoir, la notion d’ordre ou celle d’autorité, dont l’article de S. Fainzang examine la prédétermination, dans l’espace intime, par l’acculturationà une religion. L’analyse peut également porter sur les changements culturelsinduits par le médicament bien au-delà de l’espace de soin : comme l’évoquel’article de Sjaak Van der Geest et Susan Reynolds Whyte, le médicament sus-cite des transformations en termes de marchandisation de la santé et du bien-être,et d’individualisation du rapport à la santé. La portée de ces changements cultu-rels et le rôle qu’y joue le médicament – opérateur ou révélateur – doivent en-core être analysés.
Que les médicaments s’inscrivent dans des systèmes de sens ou de rapports
sociaux, qui plus est des systèmes dynamiques, les articles de Claudie Haxaire etAlice Desclaux le montrent, comme les publications de référence citées ci-des-sus. Un foisonnement de « systèmes » semble d’ailleurs disponible pour l’ana-lyse, au risque d’égarer la réflexion, au-delà des modèles les plus utilisés : la
notion de « système du médicament », transposition de la notion anthropologi-que de système médical, dont les éléments correspondent aux « secteurs de soinde santé » (biomédical, traditionnel/alternatif, populaire) ; celle de « systèmepharmaceutique », transposition de la notion de système de soin issue de la santépublique, dont les éléments correspondraient aux secteurs public, privé et infor-mel ; celle de « pharmacocénose », dont les éléments correspondraient à des re-mèdes et des médicaments, chacun qualifié de ses caractéristiques matérielles etidéelles. Les interfaces entre secteurs ou éléments composant un système ontsouvent fait l’objet d’études, comme l’article pionnier qui a décrit l’émergencedu nouveau rôle social des « injection doctors », situés entre secteurs populaireet professionnel, entre secteurs public et informel (Cunningham 1970). Le turn-over rapide des médicaments et la fréquence de la mise sur le marché de molé-cules, qui suscitent en permanence un renouvellement du champ thérapeutique,permettent d’observer les dynamiques de ces systèmes, notamment en termes demise en place des mécanismes de contrôle des savoirs associés et de l’accès auxproduits, de réinterprétations et redéploiements des produits et remèdes préexis-tants, de construction de nouvelles légitimités sociales ou de renégociations deslégitimités antérieures. Dans une perspective synchronique, les modèles évoquésci-dessus offrent aussi un outil d’analyse comparative fort pertinent, encore peuutilisé à cet effet.
Les articles de Johanne Collin et de Sjaak Van der Geest et Susan Rey-
nolds Whyte montrent combien un même produit peut être chargé de significa-tions multiples par différents acteurs, en interrelations consensuelles ou conflic-tuelles. La polysémie du médicament est aussi nourrie par son parcoursbiographique qui s’accompagne d’un cortège de valeurs en constante évolutionet par sa diffusion dans des milieux sociaux et des cultures les plus diverses. Cette multiplicité de sens est bien sûr alimentée par le fait que le médicamenttraverse de très nombreux espaces – de l’intime du corps individuel au mondia-lisé des institutions internationales. Comme d’autres objets en rapport avec lebiologique et abordés par l’anthropologie médicale, cette polysémie a égalementpour ingrédient une certaine ambivalence matérielle irréductible : les médica-ments sont à la fois cure et poison, leurs effets biologiques ne sont jamais totale-ment bénéfiques ni anodins. Ils imposent aux individus, thérapeutes et patients,de faire des choix qui sont souvent basés sur des représentations simplificatrices,marquées tantôt par l’idéologie, tantôt par l’absence d’accès aux connaissancesscientifiques sur les dimensions matérielles de l’effet des traitements, tantôt parune forme d’aveuglement induite par le désir d’efficacité – qui nourrit l’effetplacebo. Cette polysémie, doublée d’ambivalence, est sans doute un concept opé-ratoire pour aborder les enjeux de santé publique liés au médicament dans les
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sociétés contemporaines, tels que la surconsommation médicamenteuse dénon-cée par les institutions sanitaires. Si elle crée, pour l’anthropologue, de nom-breux objets de recherche potentiels assortis de multiples pistes d’analyse, ellemultiplie également le risque d’aveuglements et d’interprétations partielles, voirede surinterprétations.
Le médicament, dans ses rapports avec la culture, apparaît donc, pour l’an-
thropologue, comme un objet d’étude particulièrement riche, mais égalementcomme un objet très exigeant. Contributions
Dans leur article sur la tuberculose en Haïti, Arachu Castro et Paul Farmer
s’interrogent sur la situation paradoxale concernant le traitement de cette patho-logie puisque l’existence de médicaments efficaces n’empêche pas l’augmenta-tion de sa prévalence. Le cas haïtien illustre ce paradoxe. La multiplication dessouches résistantes y est due à des facteurs multiples relatifs au niveau interna-tional (globalisation et coûts des médicaments) et aux conditions locales (pau-vreté, état et limites des systèmes de santé locaux et difficultés d’accès aux soins,amplification des inégalités sociales). Pourtant, mais des méthodes diagnostiquesprécises et rapides sont disponibles, et il est possible de mettre en place des in-terventions nécessitant peu de moyens à la condition que les approches thérapeu-tiques soient arrimées à une aide économique et financière. Remettant en ques-tion les hypothèses biomédicales qui attribuent la progression de la tuberculose àdes problèmes de non-observance du traitement, mais aussi les hypothèses cultu-relles trop limitatives, les auteurs mettent l’accent sur la prise en considérationdes conditions économiques qui constituent « une force pathogène ». L’analysede la place des médicaments doit donc, selon Castro et Farmer, tenir compte desconditions sociales générales et des investissements nécessaires à l’améliorationdes systèmes de soins, de diagnostic et d’accès aux médicaments. Cela les con-duit, dans une perspective appliquée, à faire un plaidoyer pour une nouvelle éthi-que internationale nécessaire pour que l’efficacité biologique des médicamentsne soit plus rendue inopérante par les conditions sociales et économiques.
Alice Desclaux analyse les dimensions culturelles de l’usage des thérapeu-
tiques du VIH/sida au Sénégal, autour de trois aspects : l’expérience des traite-ments par les patients, l’accès aux antirétroviraux et leur impact sur le systèmemédical. Si l’observance est centrale dans les préoccupations médicales, les étu-des menées à Dakar montrent qu’elle ne peut être comprise qu’en la re-situantdans une analyse plus large portant sur l’expérience des traitements. Cette expé-rience est marquée au Sud par la sélectivité de l’accès aux traitements, et par lesdimensions de « marqueur social » du médicament, qui est un substrat de don et
de contre-don, et le vecteur d’une individuation pour les personnes vivant avecle VIH. L’accès aux traitements dépend en Afrique de nombreux déterminantsd’ordre économique, politique et juridique à la fois individuels et collectifs, lo-caux et internationaux ; il n’est cependant pas indemne d’une construction cultu-relle, qui gouverne tant les modalités et critères d’accès aux programmes desservices de soin publics que les stratégies individuelles et associatives pour seprocurer des médicaments. L’introduction des antirétroviraux a par ailleurs af-fecté le système de soin biomédical au plan des modes d’organisation et des rô-les sociaux ; elle a également eu un impact sur d’autres secteurs du systèmemédical, en suscitant la production de médicaments néotraditionnels que leurspromoteurs inscrivent dans des espaces laissés vacants par les multithérapies,tout en réinterprétant à leur profit l’aura d’efficacité associée à ces traitements. Cette analyse met en relief la multiplicité des stratégies socio-économiques éla-borées autour d’innovations pharmaceutiques et leurs répercussions dans le sys-tème médical et au-delà de ce système.
L’article de Julie Laplante porte sur les interrelations entre la médecine hu-
manitaire et les savoirs médicaux autochtones en Amazonie. Ces deux modesd’intervention sont inscrits dans des rapports d’exclusion et de métissage, don-nant lieu à des formes de « bricolage » auxquels le médicament offre un accèsprivilégié. L’auteure s’attache à dégager les oppositions entre les caractéristiquesdes savoirs autochtones et biomédicaux, portés par les tradipraticiens locaux etles intervenants formés à la biomédecine, qui s’organisent respectivement autourdu recours aux plantes médicinales et aux médicaments. L’importance du médi-cament apparaît ainsi dans les programmes de formation des travailleurs autoch-tones en santé, ce qui induit une dépréciation des pharmacopées autochtones faceaux pathologies endémiques, bien que certaines techniques de guérison tradition-nelles soient reconnues par les intervenants biomédicaux. Les tradipraticiens quiparticipent à cette formation acquièrent un certain prestige, et sont susceptiblesde jouer un rôle d’intermédiaires entre les deux formes de savoirs, leurs compé-tences en matière de plantes médicinales étant cependant limitées concernant la« matrice symbolique » dans laquelle s’inscrivait leur usage traditionnel. L’exemplede la malaria illustre cette dynamique. Cette analyse montre ainsi que le médica-ment se situe, selon l’auteure « aux frontières des savoirs [.] de même qu’ilgénère les transformations et l’apparition de nouvelles formes de savoirs théra-peutiques ».
L’article de Claudie Haxaire se situe dans une perspective diachronique en
analysant l’évolution des représentations des symptômes, des diagnostics et destraitements, relatifs aux infections sexuellement transmises en pays Gouro. In-terprétées en fonction de constructions qui associent leur étiologie à des trans-gressions sociosexuelles, ces pathologies sont traitées au plan des symptômes
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plutôt qu’au plan de leur étiologie sociale, sous l’influence des praticiens issusde groupes nomades allogènes, les « passants », qui offrent des remèdes à basede plantes mais aussi de médicaments d’origine industrielle comme les antibioti-ques vendus sur les marchés informels. Les traitements peuvent aussi être pres-crits dans le cadre des dispensaires selon un protocole thérapeutique qui fait uneplace plus importante aux symptômes mis en avant par les patientes elles-mê-mes. Depuis quelques années, des kits MTS ont aussi été introduits pour favori-ser l’utilisation de traitements médicalement appropriés dans les services de soin. Ce passage du remède au médicament qui s’est réalisé rapidement indique selonl’auteur que la « pathocénose et la pharmacocénose » forment un système enévolution constante. Ces remaniements ont lieu dans un contexte de transforma-tions socio-économiques qui modifient les contraintes sociales pesant sur lesfemmes dont les maladies sont extraites de leur matrice sociale pour être traitéesdans un cadre biomédical, évolution qui n’a pas encore eu lieu dans le cas duVIH/sida.
Sjaak van der Geest et Susan Reynolds Whyte cernent la dialectique qui
sous-tend le rapport aux médicaments et qui s’organise autour de l’oppositionentre la popularité et le scepticisme. Les médicaments sont perçus comme dessubstances séduisantes non seulement pour les professionnels de la santé maisaussi pour les consommateurs. Chez ces derniers, les raisons qui expliquent cetengouement sont multiples et comprennent : leur efficacité éprouvée par les po-pulations, leur dimension tangible, qui leur permet d’intervenir de façon signifi-cative et matérielle sur le corps malade, et de fournir un moyen de localisation etd’appréhension de la maladie qu’ils légitiment ainsi. Leur origine étrangère con-tribue aussi à leur plus grande attraction renforcée par les campagnes de publi-cité, les modes d’emballage et l’apparence des produits. Par ailleurs, les médica-ments, signes échangés, contribuent au renforcement des relations sociales autravers de dons et de contre-dons qu’ils impliquent. Leur pouvoir dérive aussi decelui des professionnels de la santé qui les recommandent et les prescrivent. Leursuccès est aussi lié au fait qu’ils permettent de court-circuiter certains des con-trôles sociaux auxquels les individus sont confrontés, leur usage privé, sinon se-cret, contribuant à l’autonomie dans les choix de vie et de traitement. L’ensem-ble de ces avantages n’empêche pas cependant que les médicaments soit égale-ment l’objet de perceptions négatives (liées à leur toxicité, leur agressivité etleurs effets secondaires) qui sont aussi l’expression de positions politiques. Lesrésistances à l’égard des médicaments peuvent aussi s’exprimer par des formesde non-observance, reflet d’un scepticisme face au corps médical et ses prescrip-tions ou même d’une rébellion contre ses diktats, positions alimentées par leseffets iatrogènes des médicaments et la critique de leur commercialisation. Le
refus des médicaments est signifié par le choix de médecines alternatives, en par-ticulier dans les pays en voie de développement où il existe des traditions médi-cales développées revendiquées comme l’expression d’une connaissance spiri-tuelle visant à une harmonie et un équilibre absent dans les thérapies occidenta-les. Cette analyse confirme donc la polysémie des médicaments et leur statutambivalent sinon problématique.
Johanne Collin analyse les aspects socioculturels du médicament en rela-
tion avec le vieillissement, problématique cruciale dans les pays développés dontla population âgée fait une consommation importante de médicaments. Elle mon-tre comment le médicament renvoie à des fonctions multiples tant physiologi-ques que psychologiques et fait l’objet, au plan symbolique, de représentationscontrastées. Celle du médicament-obligation met en relief les problèmes d’ob-servance des traitements par les personnes âgées et les multiples facteurs quipeuvent en moduler la gestion optimale. La représentation du médicament-con-cession est associée aux modulations de la relation thérapeutique. L’acte de pres-crire fait l’objet de plusieurs interprétations et le médicament apparaît commel’expression de la sollicitude du médecin et sa compétence, dans un processus denégociation de la prescription dans lequel entrent en jeu les spécificités de l’étatde vieillesse au plan de la santé, du rapport au corps et des motifs de consulta-tion. Le médicament devient alors l’expression de concessions de la part de l’uneou de l’autre des parties et des rapports de pouvoir qui sous-tendent la relation. Enfin, la notion de médicament-compassion est associée aux constructions socia-les de la vieillesse et à la détérioration de la qualité de vie, corporelle et psychi-que, que le médicament peut atténuer. Le recours important aux psychotropeschez les personnes âgées est rattaché à cette notion. Ainsi, la perception du mé-dicament ne peut se comprendre sans le situer dans le réseau des valeurs et desattentes sociales face à la vieillesse.
Sur un plan microanthropologique, Sylvie Fainzang s’interroge sur la place
des médicaments dans l’espace privé, leurs modalités de rangement et de con-sommation qui semblent être régies par des référents culturels. Prenant appui surun terrain auprès de groupes de patients d’origines protestante et catholique duSud de la France et dont l’appartenance socio-économique et professionnelle estdiversifiée, son analyse, qui visait à dégager les usages quotidiens des médica-ments en milieu rural et urbain, indique en premier lieu des distinctions entrel’usage individuel ou collectif des médicaments, ainsi que dans les rapports avecles médecins, et dans les stratégies de dosage des médicaments par les patients. Le rangement des médicaments au domicile est aussi révélateur de visions dumonde contrastées : les lieux privilégiés obéissent à des choix différents dans lesespaces personnels (chambre ou bureau), ou collectifs (cuisine ou salle de bains),ce qui reflète le caractère plus individualisé ou plus collectif, selon les cas, du
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rapport aux médicaments, ainsi que la relation établie entre médicament et ali-mentation. L’étude ethnographique fine du rangement des médicaments dansl’espace domestique permet ainsi de comprendre comment s’articulent les con-ceptions du corps et celles du lieu d’habitation, les espaces collectifs et privés serecoupant dans des espaces intermédiaires, qui sont aussi le reflet des rapportsparticuliers aux médicaments, au corps et à la « collectivité familiale ».
Quant à Vincent Fournier, il analyse les caractéristiques du discours con-
temporain sur le vin. Il montre comment cette boisson se charge d’une valencepositive, devenant dans la pensée biomédicale contemporaine une substance thé-rapeutique. Les données épidémiologiques supportent ainsi l’hypothèse qu’uneconsommation de vin modérée contribue à une meilleure santé, réduisant signifi-cativement les risques de maladies cardio-vasculaires, les cancers et la maladied’Alzheimer. Ces avantages, fondés sur l’autorité médicale, semblent être deplus en plus acceptés par les différentes populations et ils deviennent un des élé-ments du marketing vinicole actuel, qui vise à vendre un produit dans un marchéinternational en pleine évolution. Références
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Thursday, October 17, 2013 Plenary Session: Opening Ceremony 16:00 - 17:25 Welcome on behalf of Alzheimer Hellas Welcome on behalf of ADI Welcome on behalf of WFN Research Group on Dementia Memory: to remember and to forget. History and theories Plenary Session: Plenary Session 01 17:30 - 19:00 Research Challenges in a 2013 Predementia World The relationshi
DOCE PRUEBAS DE LA INEXISTENCIA DE DIOS Artífice de esta obra en su edición original en idioma francés, en un dibujo de Monrós, hecho especialmente para esta edición. Hay dos maneras de estudiar y de intentar resolver el problema de la inexistencia de Dios. La primera consiste en eliminar la hipótesis de Dios del campo de las conjeturas plausibles o necesarias para una explicaci